Interview : Antony Cordier et Guillaume Gouix

Publié le par Patrick

C'est dans le cadre sompteux de l'hotel / restaurant le Terrass Hôtel, à Paris, que j'ai eu le grand plaisir de m'entretenir avec le réalisateur du film Gaspard va au mariage, Antony Cordier et l'un des fabuleux acteurs, Guillaume Gouix.

LMDF : Comment avez-vous eu l'idée originale de ce film qui se déroule dans un parc animalier ?

Antony Cordier : J'avais envie de faire un film de famille dysfonctionnelle avec la scénariste avec laquelle je travaille, et en même temps on voulait faire une proposition originale. On voulait éviter le déjà-vu. Ça pouvait nous permettre d'inventer des séquences un peu loufoques et de dessiner des personnages un peu plus colorés que ceux qu'on a décrit jusqu'à présent

LMDF: Est-ce qu'il y a eu des difficultés à tourner dans un vrai parc animalier et lesquelles?

A.C : Souvent, ce sont des difficultés au niveau du son, il y avait des grands singes, des gibbons, qui chantaient et c'était très beau, mais quelquefois il fallait attendre pour tourner car lorsqu'on est dans un zoo, il y a une forme de respect quand on au milieu des animaux. Il y a toute la vie animalière et le fonctionnement du zoo, le fait qu'il est un peu compliqué de tourner avec les animaux. En même temps, on savait que c'était le sujet du film, quand on se lève pour aller bosser le matin et qu'on traverse le parc avec tous les animaux ça vous met dans un état de bonheur....

LMDF : C'est justement le côté paradoxal car tout le monde aurait envie de passer sa vie dans un zoo, et dans le film on évoque le fait de craquer, d'en avoir marre d'être à cet endroit au bout d'un moment, par rapport à la vie qui a évolué, et par rapport aux personnages qui n’ont pas évolué comme ils l’auraient voulu.

A.C : Il y a plusieurs choses, il faut que les protagonistes quittent le monde de l'enfance pour vivre leur propre vie, puis il y a le fait que l'on vit dans une époque on arrive à la fin de beaucoup de choses, pour le cinéma, par exemple, on n'est pas sûr que dans quelques années des gens veuillent encore se déplacer pour aller voir des films dans une expérience collective, alors que la vidéo à la demande est si accessible. Ces choses sont fragiles, ce sont des choses du XXe siècle, et les zoos font partie de ces choses.

LMDF: Au niveau du casting, il y a une osmose parfaite, on a l'impression que les acteurs se connaissaient les uns les autres : comment s'est passé le choix des personnages ? 

A.C: Je sais par expérience que souvent c'est aux acteurs de venir au film et pas systématiquement au réalisateur de venir aux acteurs. On se rencontre et on essaie de voir s'il y a une envie réelle, si on s'entend bien, si on arrive à se parler, c'est une forte entente humaine, et si l'entente humaine est là, après on peut aborder les personnages.

LMDF : Pour Marina Fois et Elodie Bouchez (Déjà présentes dans son précédent film Happy Few, en 2010, NDLR)  c'était un choix dès le début ou bien le choix s'est fait à la lecture du scénario?

A.C : On avait fait un film ensemble et I’expérience avait été assez forte, il y avait envie de retravailler ensemble. Tourner un film, c’est aussi partager des moments, et il y avait une forte envie de partager.

LMDF : Justement par rapport au rôle que tu as, ton personnage paraît le plus équilibré et le plus sensé, il gère tout, comment as-tu abordé ce personnage en contraste avec les autres protagonistes de l'histoire ?

Guillaume Gouix : Moi, j'aime bien que choses existent, c'est un personnage terrien, j'avais besoin qu'il fasse beaucoup de choses tout le temps, qu'il ait les poches pleines d’objets. Ce qui m'a aidé, c'est le contexte extérieur, j'avais besoin d'utiliser le décor et ça m'a aidé pour le personnage. Je me suis beaucoup appuyé là-dessus pour l’interprétation. Après c'est un personnage qui subit un peu, il n'a pas choisi d'être gestionnaire, il est responsable malgré lui.

LMDF : Depuis que tu as réalisé des court-métrages, as tu un regard différent lorsque tu arrives sur un tournage ou bien ça n'a pas changé?

G.G : Je reste acteur, avant de tourner les court-métrages, ça m’a toujours intéressé de savoir comment fabriquer un film, qui faisait quoi à quel poste, tout ça m’a passionné depuis l’adolescence, mais sur un tournage où je suis acteur je reste acteur, ça m’intéresse de savoir comment se construit le film. Je suis peut-être un peu plus patient, je comprends qu’il y a des choses qui prennent du temps pour un metteur en scène, quand on est acteur on a une énergie très vive, donc on a envie de faire passer des choses et parfois envie que ça aille vite, donc ça m’a appris à patienter.

Antony Cordier  s'adressant à Guillaume Gouix : Et le fait d’être acteur, quand tu réalises, ça te sert ou c’est juste l’expérience ?

G.G : Pour le coup je peux être très à l’écoute et à la fois de la technique et à la fois quand il faut y aller pour eux, il faut que j’y aille.

A.C : Et quand tu diriges, tu joues à leur place des fois ?

G.G : Non, pas vraiment mais j’ai des acteurs très doués (rires) donc j’essaie de ne pas trop le faire.

LMDF : Dans le film,  il y a des scènes de nudité, est-ce que ça été facile de demander aux interprètes où il a fallu en expliquer la nécessité ?

A.C : C’est toujours très compliqué, même pour quelqu’un qui a déjà tourné des scènes de nu, il y a toujours des difficultés quel que soit l’âge, quel que soit le sexe, fille comme garçon. C’est une négociation qui commence dès les premières rencontres, je ne tombe plus dans certains pièges, en général je suis très clair dès la première rencontre et j’essaie de m’y tenir. Bien sûr, il est toujours une peur que les acteurs disent « Peut-être que je peux la faire pas nu mais de telle manière, plutôt comme ça que comme ça ». Je peux pas m’embarrasser de ce genre de choses, pour avoir essayé c’est une galère, les scènes deviennent horribles, donc je fais attention à ce que les acteurs voient mes précédents films, voient comment les acteurs apparaissent afin que la confiance s’installe. Je pars du principe que quand on est un acteur, on est un artiste, quand on est un artiste, l’expression de la nudité doit intéresser au même titre que plein de choses, monter à cheval, faire de la peinture, faire du karaté, on doit s’intéresser à des tas de domaines ; je trouve que c’est ça être un artiste. J’ai beaucoup d’admiration pour les acteurs à cause de ça. Pourquoi est-ce qu’on s’intéresserait pas à ce que c’est que de jouer nu, de représenter la nudité, c’est intéressant même si je comprends les raisons pour lesquelles ça n’est pas évident. Après la notion de pudeur… Quelquefois être à nu c’est plus difficile qu’être nu.

G.G : Après la notion de pudeur… Des fois, être à nu c’est plus dur qu’être nu.

LMDF : On en arrive à la musique, comment as-tu choisi le compositeur  (Thylacine, NDLR) ? 

A.C : Et bien pendant que j’écrivais le scénario, je suis allé un concert et j’ai trouvé la musique vraiment intéressante, c’était un genre d’électro qui m’intéressait, ce n’était pas seulement un rythme mais aussi un sentiment, et en écrivant le scénario la musique qui m’aidait à écrire. Je savais qu’il y avait une part de mélancolie dans la musique et que la musique allait pouvoir l’apporter. Ce qui était intéressant, en fait, c’est que la musique apporte une part un peu amère et que nous on apporte une part douce avec la comédie.

LMDF : J’ai vu qu’il y avait de grandes plages consacrées à la musique, est-ce que c’était prévu dès le scénario ou c’est en cours de tournage que ça s’est décidé ?

A.C : C’est au montage en fait, et des choses qui n’étaient pas dans le scénario devaient être exprimées dans certaines séquences au montage, le fait qu’il y avait une menace par exemple autour du zoo. Nous étions sur une comédie mais en même temps il y avait autre chose, il y avait les animaux qui tournaient autour du zoo, c’était un peu plus que ça, il fallait quelque chose de plus inquiétant. Il fallait que la musique apporte ces inquiétudes, c’est le rôle de la musique dans le film.

LMDF : D’ailleurs, il y a une très belle scène vers la fin où sont réunis les trois acteurs, avec les lampes de poche, une scène magnifique.

A.C : C’était le dernier jour du tournage, c’était avec le père en plus il y avait une urgence ce jour-là, c’était compliqué de tourner dans cet enclos car cela gênait les animaux, du coup on a du la tourner dans une forme d’urgence, ce qui confère une ambiance particulière à cette scène.

MLDF : Quels sont vos projets après ça ?

G.G : J’ai fait un film de Guillaume Nicloux, qui s’appelle Tassen, les confins du monde avec Gaspard Ulliel  et Gérard Depardieu, après j’ai un deux tournages de prévu.

 

LMDF : Et en tant que réalisateur ?

G.G : Pour l’instant j’écris, je me laisse le temps.

A.C : Moi j’ai quelques projets, mais je ne sais pas encore, ils en sont tous à un stade de développement différent, pour l’instant,  je me concentre sur la sortie de Gaspard va au mariage

Guillaume Gouix dans Gaspard va au mariage - Copyright AGAT FILMS / Jeannick Gravelines

Guillaume Gouix dans Gaspard va au mariage - Copyright AGAT FILMS / Jeannick Gravelines

Publié dans Interview, 2018

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